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samedi 19 mai 2012

« Les écoles et les universités doivent former à la responsabilité sociale »




La « déclaration de Rio pour l'enseignement supérieur » engage les présidents d'écoles et d'universités à travers le monde à enseigner les concepts du développement durable, soutenir la recherche sur le sujet et promouvoir la gestion éco-responsable des campus. Explications sur cette initiative soutenue par l'ONU avec Jean-Christophe Carteron, directeur RSE d'Euromed Marseille et membre du groupe Développement durable de la Conférence des Grandes Ecoles.

Novethic : Qui promeut la « déclaration de Rio pour l’enseignement supérieur » ?

Jean-Christophe Carteron : La déclaration, qui est en ligne depuis le 1er mars, est portée par six branches onusiennes, l’Unesco, l’Unep, le Global Compact et l’ UNPRME (Principes pour l’éducation au management responsable, 400 universités dans le monde), le réseau de l’Université des Nations Unies, l’Academy Impact des Nations Unies, et le PNUE. Elle est également soutenue par des réseaux internationaux comme l'EFMD, qui  est l'un des organismes accréditeurs internationaux dans le domaine de l'enseignement du management.

Combien de signataires se sont engagés ?

Il faut savoir que les signataires ne peuvent être que les présidents ou directeur d’écoles et d’universités. 150 l’ont à ce jour signé dans des pays aussi différents que l’Australie, le Brésil, la Chine, le Bengladesh…Une quarantaine de pays environ. Nous espérons obtenir 1000 signatures pour le sommet de juin. Même si cette déclaration n’est pas contraignante (pas d’objectifs chiffrés, ni de date), elle est pour autant engageante dans la mesure où elle demande aux « patrons » d’écoles et d’universités d’expliquer leurs engagements et les mesures qu’ils ont prises ou qu’ils vont prendre. Un suivi des engagements sera effectué ensuite.
Quel type d’engagements sont attendus ?
Un premier niveau consiste à reconnaître que les écoles et universités ont une responsabilité dans la construction du monde de demain. Le constat est en effet le suivant : même si à Rio les Etats parvenaient à élaborer un texte commun qui soit satisfaisant pour les entreprises, les institutions, les ONG… sans l’enseignement et la formation des futures générations de décideurs, cela ne servirait à rien. Or, l’enseignement est encore peu présent dans les négociations internationales.

Un deuxième niveau d’engagement consiste à vouloir inclure le développement durable dans le contenu de ce qui est enseigné, dans la recherche, la gestion des campus et leur ancrage territorial. Dans ce cas de figure, les dirigeants d’écoles et d’universités qui se disent engagés s’engagent à « tirer le marché vers le haut », notamment en partageant les meilleures pratiques pour y parvenir.

LES SIGNATAIRES EN FRANCE
BEM Bordeaux Management School, Ecole de design Nantes Atlantique, Ecole des Mines de Douai, Ecole des Mines de Nantes, Ecole nationale de chimie de Montpellier, Ecole nationale supérieure de mécanique et d’Aérotechnique, Ecole Nationale Supérieure d’Ingénieurs en informatique, Ecole nationale Vétérinaire de Toulouse, EESCEM Tours Potiers, Ecole supérieure des sciences commerciales d’Angers, ESCP Europe, ESG management school, Euromed management, Grenoble Ecole de management, ESC Pau, ESC Toulouse, ICN Business school, Institut polytechnique Lassale-Beauvais, Université  Jean Moulin Lyon 3, Mines Paris tech, Polytech Montpellier, Skema Business school, Université Aix Marseille, Université d’Angers, Université Versailles Saint-Quentin en Yvelines.
Et quels engagements avez-vous déjà recueillis ?
Les initiatives sont très différentes d’un pays à l’autre, pour des raisons culturelles ou réglementaires évidentes. On peut citer l’université de Melbourne, qui s’engage à investir 500 millions de dollars sur 5 ans pour améliorer la performance énergétique des bâtiments, instaurer un tri des déchets et économiser l’eau. D’autres s’engagent à réduire leur bilan carbone, à publier un rapport DD, etc…. Certains pays sont très poussés par la réglementation, comme le Royaume-Uni qui conditionne les subventions pour l’enseignement public aux émissions de gaz à effet de serre. Aux Etats-Unis, la non discrimination, le respect de l’égalité Homme/Femme ou la prévention du harcèlement sont d’abord des politiques globales, et ne sont pas présentées comme un pilier social du développement durable contrairement à la vision européenne.

Les engagements qui concernent la gestion des campus sont plus faciles à mettre en œuvre que ceux qui concernent les contenus des cours…

Pas forcément ! Certaines universités et écoles ne sont pas propriétaires de leurs bâtiments, ne choisissent pas leurs fournisseurs, etc. Pour des raisons pratiques, ce n’est pas plus simple que d’orienter la recherche sur des thématiques DD, par exemple. La vraie difficulté consiste, de manière générale, à mettre en cohérence ce que nous affichons avec ce que l’on enseigne et recherche. Il existe bien sur des résistances, mais les dirigeants sont poussés par les professeurs, les salariés de leurs établissements, et bien entendu les élèves, qui ont de réelles attentes sur ces sujets.  


Comment transformer le contenu de l’enseignement ?

Il faut apprendre aux futurs managers à être socialement responsables et pour cela le contenu des formations ne doit pas être exclusivement orienté vers les recruteurs. L’enseignement doit les former aux enjeux de la société et leur donner de nouvelles compétences en faisant intervenir l’ensemble des parties prenantes avec qui ils devront coconstruire (ONG, syndicats, experts en risques psychosociaux, etc). Car ils seront confrontés un jour ou l’autre à la gestion de ces risques. Les entreprises ont besoin de dirigeants qui sauront dialoguer avec des publics différents, qui auront une vison de long terme pour l’entreprise tout en sachant répondre aux impératifs du court-terme. Demain, les ressources naturelles seront insuffisantes et coûteront trop cher aux entreprises de ne pas récupérer leurs déchets...Gérer la rareté et être capable de modifier le business model sera impératif.


Quelles sont vos attentes pour cette déclaration à Rio ?
Aujourd’hui, dans les 70 pages du « draft zéro » élaboré pour le sommet, quatre paragraphe concernent l’enseignement. Or, ces passages font partie des contenus « entre crochets », ce qui signifie qu’ils peuvent très bien disparaître du texte définitif d’ici le sommet. Nous voulons donc que non seulement les Etats ne les suppriment pas, mais qu’ils puissent les améliorer. L’objectif est de montrer aux décideurs politiques  qu’ils ne prennent aucun risque  sur ce sujet, qui est peut être plus consensuel que d’autres… Nous aurons des side event avec des présidents d’université, des représentants de l’ONU, l’idée est de convaincre les délégations gouvernementales qu’elles ont intérêt à intégrer l’enseignement, et l’enseignement supérieur en particulier, comme des acteurs essentiels dans l’évolution de nos pratiques.

Où en est le processus de labellisation pour les campus durables ?
La Conférence des Présidents d’Université (CPU) et la Conférence des Grandes Ecoles (CGE) ont créé un comité labellisation et travaillent à le mettre en cohérence avec les autres initiatives internationales, comme « Stars » aux USA ou « LIFE » en Grande- Bretagne. Les premiers labels seront attribués en 2013. A terme, nous esperons que ces labels deviennent un des critères pour l’évaluation des écoles et des universités.

Propos recueillis par Véronique Smée

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